La prévoyance et les femmes
mai 14, 2021Roxane Ecoffey
Senior Wealth Manager
Les mots «femme» et «prévoyance» sont régulièrement cités en binôme, mais cela ne concerne-t-il que les femmes ?
Depuis plusieurs années, il est souvent fait mention du problème de la prévoyance auprès des femmes. Cela devient effectivement un challenge pour garantir ses prestations risque et épargne lorsqu’une personne prend des décisions qui auront un impact sur son 2e pilier, comme la baisse du taux d’activité. Sans vouloir entrer dans les clichés, force est de constater que ladite diminution concerne plus fréquemment les femmes, et plus particulièrement après la naissance du premier enfant, tout dépendra de différents facteurs, comme par exemple les responsabilités de son poste, l’industrie dans laquelle elle travaille son envie tout simplement. Il est donc aisé de faire un lien de cause à effet entre la prévoyance et les femmes. Mais il est intéressant de chercher pourquoi cette conclusion est régulièrement exposée, et d’analyser si les hommes ne seraient pas eux-mêmes sujet à une baisse de leurs prestations.
Même si la loi sur l’égalité entre femmes et hommes date de 1995, et que sa partie relative aux salaires a été révisée en 2020, la femme continue de manière générale à percevoir un salaire plus faible, à travail égal. Fort de ce constat, et au-delà de l’aspect émotionnel, à savoir une volonté d’être présent pour son enfant, la réflexion des parents se doit d’être malheureusement économique et factuelle : celui qui baisse son taux est celui qui gagne moins. La femme, de par sa baisse ou son arrêt d’activité, prétérite sa couverture de prévoyance.
Par ailleurs, même si cette dernière conserve son travail à 100%, elle sera malgré tout pénalisée le jour de sa retraite. En effet, à cause d’un salaire inférieur à celui de l’homme tout au long de sa carrière, son capital de prévoyance ne peut être logiquement que plus petit que celui de son homologue masculin. De plus, il lui manque une année de cotisations, l’âge de la retraite étant à 64 ans au lieu de 65. Cependant, cette lacune devrait vraisemblablement disparaître dans les prochaines années, l’âge de retraite passant à 65 ans quel que soit le sexe.
Il est donc d’une grande importance que les employeurs, autant que faire se peut étant donné le coût des charges sociales, souscrivent à une couverture de prévoyance qui garantisse de bonnes prestations risque et épargne à leurs employés. A chaque décision impactant le salaire, les conséquences sur le long terme doivent être prises en considération par la personne concernée, mais également par son conjoint : en cas de décès ou d’invalidité, quel sera le montant versé, et comment les avoirs seront partagés en cas de divorce? Les personnes sont-elles bien conscientes de ces éléments-là ? Par ailleurs, cet impact ne concerne-t-il vraiment que les femmes ?
N’oublions pas que la société évolue : à l’heure actuelle, les pères ont eux aussi envie de s’impliquer dans l’éducation de leurs enfants, chose qui était encore rare il y a quelques années, à cause peut-être de la vision ancestrale de la place de l’homme. Mais au-delà d’un changement dans sa situation familiale, une personne peut avoir un projet privé qui lui tient à cœur de réaliser, comme un long voyage, une réorientation professionnelle, la volonté de se lancer dans une activité en indépendant. Qu’importe qu’on soit homme ou femme, la prévoyance sera touchée provisoirement ou sur le long terme.
De plus, la jeune génération d’employés a aussi mis en exergue une volonté de se ménager un meilleur équilibre entre la vie privée et professionnelle. Cette aspiration commence aussi à motiver les autres générations. Pour être en mesure d’allouer suffisamment de temps à sa passion, comme le sport ou la musique, et avoir du temps pour soi, certaines personnes n’hésitent pas à diminuer leur temps de travail. Outre la réflexion sur l’impact fiscal et financier d’une baisse du taux d’activité, rappelons à nouveau qu’il faut également se préoccuper des conséquences sur sa prévoyance.
En conclusion, le thème « les femmes et la prévoyance » est bien à prendre en considération, mais pas exclusivement. Pour être plus précis et éviter toute généralisation, sa dénomination la plus correcte devrait être « les inégalités salariales, les modifications du taux d’activité, les arrêts dans son parcours professionnel et la prévoyance ».
Roxane Ecoffey
Roxane Ecoffey a rejoint la Banque Gonet en novembre 2017. De 2010 à 2017, elle a été active auprès des banques Lombard Odier et Pictet dans le domaine de la prévoyance professionnelle et des ressources humaines. Elle est titulaire d’un master en gestion d’entreprise de l’Université de Fribourg et du brevet fédéral en prévoyance professionnelle.