2022: une fin d’année boursière exceptionnelle ?

2022: une fin d’année boursière exceptionnelle ?

mai 24, 2022 Non Par Invité(e)s

Anton Sussland
Founder & Managing Partner
Sussland & Co SA

Pour tout analyste des marchés financiers, il est utile d’essayer de garder une perspective historique des événements. En effet, si le futur est de plus en plus difficile à prévoir, des événements passés peuvent donner un éclairage intéressant sur le présent et les scénarios possibles. À ce titre, il est intéressant d’évoquer les adages boursiers. En effet, ces «dictons» et «paroles de sagesse» trouvent leur origine, pour certains, il y a plus de 150 ans, dans un monde qui semble ne plus avoir grand-chose en commun avec le monde actuel. Toutefois, cela n’est pas tout à fait juste. Bien que les entreprises, la société et la technologie aient beaucoup changé, la nature humaine, elle, est restée la même. Ces dictons sont tout aussi pertinents aujourd’hui que lorsque la Bourse de Wall Street en était à ses débuts.

Les émotions plus fortes que la raison

La personnalité de l’être humain continue à basculer entre optimisme absolu et pessimisme le plus noir. Les dictons comme «il faut acheter quand tout le monde vend, et vendre quand tout le monde achète» sont connus de tous. Toutefois, dans la réalité des marchés, on constate qu’en cas de crise, chez la plupart des investisseurs, les émotions prennent le dessus sur la raison. La peur fait vendre des actifs à des prix cassés, alors que la raison voudrait que l’on profite des opportunités d’achat. Ce comportement se répète sans arrêt, et peu de gens semblent apprendre des erreurs commises. En Suisse romande, lors de la crise immobilière des années 1990, il y avait des fortunes à gagner en achetant des biens immobiliers que bradaient les banques. Après la bulle financière de 2009, les investisseurs pouvaient acheter des actions LVMH ou des actions L’Oréal à moins de 50 euros. Plus récemment, le plongeon boursier en mars 2020 lié à la crise du Covid-19 a donné des opportunités d’achat que beaucoup d’investisseurs regrettent de ne pas avoir saisies.

Des hausses proportionnelles aux baisses

Chaque crise boursière, que son origine soit liée à l’économie ou provoquée par un choc exogène, se déroule exactement de la même manière. Dans un premier temps, les investisseurs paniquent. C’est «la fin du monde», une situation «jamais vue» qui n’a «aucun précédent» et dont «personne ne peut imaginer l’issue». Les cours des actifs financiers chutent de manière brutale avec les analystes qui renforcent le sentiment de peur. Dans un deuxième temps, une fois que les vendeurs ont terminé de brader leurs portefeuilles, les investisseurs essaient de mesurer l’impact économique à long terme des événements. Dans tous les cas, les perspectives ne se révèlent pas aussi mauvaises que ce qui était annoncé et les titres remontent. Les hausses des actifs sont proportionnelles aux baisses qui les ont précédées. Autrement dit, les cours augmentent beaucoup et rapidement. On constate ainsi que les meilleurs «crus» boursiers sont ceux qui ont suivi des krachs.

Le moment est propice

L’histoire suggère ainsi que le moment actuel est propice pour faire des investissements. En effet, une analyse fondamentale de la situation actuelle fait ressortir une économie globale forte, s’appuyant sur une croissance de ses trois piliers centraux. En premier lieu, le consommateur, qui représente plus de deux tiers de l’économie, est dans une situation enviable. À la suite du Covid-19, ce dernier a pu accumuler une épargne importante, et les taux de chômage aux Etats-Unis et en Europe sont au plus bas, ce qui compense largement l’effet de l’inflation actuelle. Signes de cette force du consommateur, les réservations d’hôtels, de billets d’avion ou de croisières sont à leur plus haut. En deuxième lieu, les entreprises profitent de carnets de commandes pleins à craquer dans un environnement post-covid qui montre des pénuries à tous les niveaux dans la production, le stockage et le transport. En troisième lieu, l’état, autre acteur économique important, continue à augmenter les dépenses publiques. La guerre en Ukraine a accéléré les dépenses dans l’armement, les infrastructures énergétiques et la transition énergétique. Inutile de s’étendre beaucoup plus. Si la consommation, les entreprises et les états contribuent tous à la croissance économique, celle-ci sera forte et les résultats des entreprises seront bons.

Deux facteurs déflationnistes intacts

Beaucoup de gens s’inquiètent de la hausse des taux d’intérêt et de l’inflation. Selon nous, l’inflation est passagère et devrait baisser pour retrouver des niveaux « normaux ». En effet, il ne faut pas oublier que les problèmes de pénurie et de guerre en Ukraine sont des facteurs d’inflation à court terme, qui ne sont pas durables. Une fois les chaînes d’approvisionnement «reconstruites», on constatera que le monde n’est pas à court de matières premières. Dans le cas des matières premières agricoles, des pays comme les États-Unis, l’Argentine ou le Brésil, qui disposent de terrains agricoles «illimités», seront ravis de pouvoir augmenter leur production. Les deux facteurs déflationnistes importants à long terme demeurent intacts. Ce sont les tendances démographiques et la technologie. L’évolution de la pyramide des âges et la diminution de la population que l’on voit dans certains pays (p. ex. l’italie) ne peut être que déflationniste sur la longue durée. C’est ce que l’on observe au Japon depuis plus de trente ans. La technologie permet de réduire les coûts sur la durée et sera une solution à l’inflation existante. Par exemple, aujourd’hui, le monde manque de conducteurs de camions, ce qui augmente les coûts et provoque des pénuries. Toutefois, ce n’est qu’une question de temps avant que les camions autonomes ou semi-autonomes deviennent la norme, réduisant ainsi les besoins de conducteurs de camions. Qui ose, gagne!

Anton Sussland
Founder & Managing Partner
Sussland & Co SA

Titulaire du diplôme fédéral d’expert-comptable et du diplôme fédéral d’analyste financier et gestionnaire de
fortune, Anton Sussland est fondateur de la société Sussland & Co S.A. Cette société est active dans la gestion de fortune et l’asset management et a mis en œuvre une gestion d’actifs où les critères d’inclusion des femmes et de diversité sur la place de travail font partie intégrante du processus de sélection des titres. Dans ce cadre Sussland & Co, gère des mandats et des produits financiers avec actions de sociétés mondiales promouvant l’inclusion et la diversité dans le monde du travail. La société offre des services de conseils en investissement aux particuliers et aux intermédiaires financiers.